Mon papa pirate. Davide CALI et Maurizio A.C. QUARELLO - 2013 (Dès 7 ans)

Publié le 10 Septembre 2014

Mon papa pirate

Texte de Davide CALI

Illustrations de Maurizio A.C. QUARELLO.

Edtions Sarbacane, 2013.

Dès 7 ans.

Notions abordées : piraterie, travail, espoir, séparation, transmission intergénérationnelle, Italie.

J’ai découvert cet album époustouflant d’émotions sur le blog de Sophie Hérisson, dont le titre, et surtout le mot « pirate » m’ont d’abord sauté aux yeux ! C’est qu’à la maison, nous les adorons !

Quand j’étais petit, mon papa n’était jamais à la maison.
Il ne revenait qu’une fois par an chez nous, en Italie, pour les vacances d’été.

Il sentait la mer, mon papa. Parce que c’était un pirate.

Un grand pirate.

Comment expliquer à nos enfants en quoi consiste notre travail ? Il est parfois bien difficile de trouver les mots pour le décrire et davantage pour l’expliquer. Comment ne pas susciter l’inquiétude et la crainte lorsqu’on est mineur, un métier si dangereux ? Comment expliquer à son enfant qu’on le quitte pour mieux pouvoir s’en occuper ?

Le papa de ce garçon a choisi de travestir la réalité, terne et triste, pour la rendre plus supportable, plus belle, plus protectrice aussi. Son absence est comblée par tous les récits d’aventures qu’il fait à son fils lors de son retour annuel et les rêves qu’ils suscitent !

Pirate, il navigue l’année durant sur son navire l’Espoir pour trouver des terres où extirper de nombreux trésors ! Il raconte à son fils son équipage, leur vie et caractères, des anecdotes et rapporte toujours un petit présent, une dent de requin, un coquillage et l’année de ses sept ans, un grand drapeau pirate !

Mais, à ses neuf ans, à la place du père, c’est une lettre qui arrive, le garçon embarque avec sa mère dans l’espoir de voir la mer, puisque qui dit pirate, dit mer…

Mais à la place, un train et sa fumée grise, une ville sombre dans un autre pays, la Belgique, des songes bien agités… Papa est mort ?

Pas mort, heureusement, mais blessé.

Mais surtout, ce jour-là, j’ai cessé d’être un enfant.

Je me suis approché, et j’ai eu l’impression de me trouver face à un inconnu. Il m’avait raconté tant de mensonges.

Un enfant a tellement besoin de croire que son père est un héros…

Son papa n’est pas pirate, il est mineur. Ses trésors arrachés à la terre, ce sont les tonnes de charbon ; ses aventures périlleuses, le risque d’effondrement des galeries ; son navire l’Espoir, l’endroit où il est dormait (appelé ainsi pour « l’espoir de rentrer à la maison ») ; son équipage, ses collègues…

Le papa d’avant laisse place au papa de maintenant, qui ne partira plus désormais. Les années passent, les personnes vieillissent, le monde change et l’arrivée d’une lettre rompt enfin le silence. Le papa raconte son histoire. L’enfant nous la raconte.

J’ai découvert l’auteur, Davide Cali, avec trois albums aussi dissemblables que possibles, La revanche des aubergines, Marlène Baleine et L’ennemi ! Et c’est cela qui m’a fait tomber sous son charme ! J’ai découvert le travail absolument magnifique de l’illustrateur, Maurizio A.C. Quarello avec l’album Barbe-Bleue.

Davide Cali, par le biais de son album, nous fait le récit authentique de tous ses anonymes italiens partis travailler loin de chez eux suite à l’accord signé le 23 juin 1946, entre l’Italie et la Belgique.Il prévoit l’envoi de 50.000 travailleurs dans les mines belges contre l’approvisionnement de 3 millions de tonnes de charbon annuel.

Ce n’était pas le premier du genre, il ne sera pas le dernier…

Son texte, très sensible, utilise tous les attributs des pirates, la mer, la vieille carte poussiéreuse, les trésors, le navire et son équipage, le perroquet, le pavillon, et jusqu’aux odeurs. Il nous laisse deviner derrière les mots, le pourquoi de l’absence. Le texte n’a pas toujours la même taille ni le même emplacement, petit ou gros, il occupe parfois les deux pages. Les mots, les lettres, jouent en taille comme l’intonation d’une voix.

Les illustrations de Maurizio A.C. Quarello sont absolument magnifiques et possèdent leur propre narration.

Réalisées aux crayons, elles semblent vieillies, fragiles, sensibles. Bien que très différentes de celles de Barbe-Bleue, on distingue plusieurs traits communs, dans les profils ou silhouettes des personnages. La couverture, avec ses quatre coins marron, me fait penser au dessus d’un coffre, que l’on s’apprête à ouvrir.

Une illustration a particulièrement retenu mon attention, celle du cauchemar de l’enfant. Elle figure une énorme vague, qui semble être une référence à celle du maître de l’estampe japonaise, Hokusai, avec : la grande vague de Kanagawa (1831).

Je l’ai déjà vue dans un autre album, chroniqué ici, Dragon de feu de Chen Jiang-Hong, et elle est également le logo de la marque de sport Quicksilver.

Grande vague de Muarizio A.C.Quarello - Hokusaï - Chen Jiang-Hong et logo de Quicksilver.Grande vague de Muarizio A.C.Quarello - Hokusaï - Chen Jiang-Hong et logo de Quicksilver.
Grande vague de Muarizio A.C.Quarello - Hokusaï - Chen Jiang-Hong et logo de Quicksilver.Grande vague de Muarizio A.C.Quarello - Hokusaï - Chen Jiang-Hong et logo de Quicksilver.

Grande vague de Muarizio A.C.Quarello - Hokusaï - Chen Jiang-Hong et logo de Quicksilver.

Un album sensible et délicat sur ces héros inconnus, ces pères, ces hommes absents, dont la fin m’a particulièrement touchée et émue !

Belles lectures et découvertes !

Blandine.

Album lu dans le cadre du Challenge « Je lis aussi des albums 2014 » de Sophie Hérisson, ainsi que pour celui d'Enna, Challenge "Petit Bac 2014", pour ma deuxième ligne jeunesse, catégorie SPHERE FAMILIALE.

Ce titre participe au Prix des Incorruptibles 2015-2016, sélection CE2/CM1.

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                                                      92/100

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S
Tu me donnes envie de le relire !!
Répondre
B
;-)<br /> Et je ne peux que t'y encourager!